Je me suis interrogée sur la position actuelle de Chiron en Bélier à mi-chemin entre Saturne en Poissons et Uranus et Taureau. J’en partage ici la réflexion.
Commençons par quelques données techniques :
Déjà, cet astéroïde évolue entre ces planètes géantes que sont Saturne et Uranus dans notre système solaire. Cette position fait évoluer Chiron à un rythme très irrégulier, qui peut transiter un signe entre 2 ans et 7 ans, selon qu’il est aspiré par l’un ou l’autre. Les conjonctions avec Saturne ou Uranus se font aussi plutôt rares. Par exemple, Chiron et Saturne ont été ou seront ensemble en 1966, 2028 et 2111 et pour une rencontre entre Chiron et Uranus, nous trouvons 1898, 2042 et 2149.
Non seulement Chiron entremêle un peu l’énergie de Saturne et d’Uranus, c’est aussi un centaure, un être hybride mi-homme mi-cheval. Et pour insister sur cet aspect hybride, il est aussi un astéroïde-comète car il garde un résidu de queue venant de sa propulsion dans un passé très ancien des confins du système solaire avant d’être aspiré et fixé entre Saturne et Uranus.
Au moment où j’écris ces lignes, Saturne est à 15° Poissons, Chiron à 20° Bélier et Uranus à 21° Taureau, trois signes qui se suivent. Cela durera encore un moment, jusque dans les premiers mois de 2025 avant que Saturne n’entre en Bélier. Il y a un peu d’oscillation en tenant compte des rétrogradations. En mai et juin, les degrés sont plus resserrés ainsi qu’en février-mars 2025. Par moments, Chiron est véritablement au mi-point entre les deux.
Comment interpréter ce trio dans cette période si troublée?
Qui est Chiron? Centaure qui a enseigné à tous les héros grecs, médecin avec une grande connaissance des animaux et des plantes, dont la science des remèdes, si bon musicien qu’il pouvait soigner avec sa lyre, astrologue aussi, il savait lire le ciel et de plus, était habile avec son arc. Un être assez complet finalement! On l’appelait Chiron le Sage.
Lors de la guerre avec les centaures, il ne prend pas partie, ne pouvant choisir entre ses semblables et ses ouailles. Il se retire mais il n’empêche qu’il se retrouve quand même blessé par son élève préféré, Hercule, et ce, d’une flèche enduite d’un poison mortel. Étant un dieu et donc immortel, à force de souffrance, il demande à Zeus de le faire mourir. Exaucé, son immortalité est transférée à Prométhée.
Celui-ci, médecin également mais plus irrévérencieux, a volé du feu à Zeus pour le transmettre aux hommes.
Chiron est, entre autres, un symbole de résilience, une force utile lorsqu’il faut savoir s’adapter à une réalité nouvelle. Et il est aussi un symbole de quête d’équilibre entre les instincts (animal), la raison (humain) et le spirituel (il sait lire le ciel d’où le besoin de sens).
Quant à Saturne, dernière planète visible, connue des hommes depuis toujours, il représente le connu, le maintien des choses, les structures, l’autorité, la gouvernance, le contrôle, la discipline, et aussi les limites.
Et Uranus de son coté, planète invisible à l’œil nu, découverte seulement en 1782, représente l’ouverture sur du plus large, l’inconnu, la nouveauté, la modernité, l’inédit, la vision nouvelle, l’éveil, l’indépendance et surtout une provocation au changement. Il tourne différemment des autres planètes sur lui-même, ce qui évoque l’originalité ainsi que la rébellion.
Notre irrévérencieux Prométhée s’associe aisément à l’énergie d’Uranus.
Nous nous retrouvons dans un temps de changement majeur. Les paradigmes changent, et comme on dit, les plaques tectoniques bougent. Changement climatique, technologies nouvelles qui s’imposent, économie chamboulée, réseaux sociaux anarchiques, immigration massive due à de multiples facteurs, etc. Et maintenant des guerres qui inquiètent par le risque d’embrasement élargi. Le monde entier s’en retrouve bousculé et doit revoir ses positions et ses orientations.
On ressent bien le passage d’un monde connu (Saturne) pour aller vers du nouveau (Uranus). Une nouvelle réalité se met en place. Elle reste en grande partie à inventer. Il y a donc à accepter des limites, une impossibilité de simplement continuer, il nous faut quitter le connu. Il y a une route nouvelle à trouver, à travers tout ce tiraillement et sans en voir clairement la suite. Il y a d’une part résistance au changement et si elle est trop forte, on risque ainsi la rupture brutale. Et d’autre part, l’impatience de voir arriver le nouveau encourage des sauts en avant qui peuvent se faire en aveugle.
Chiron se retrouve donc d’un côté avec un Saturne en Poissons qui cherche à incarner un idéal transcendant, et celui-ci peut être très différent d’un groupe à l’autre, voire totalement en contradiction. Saturne en Poissons veut un monde meilleur et œuvre en ce sens. On y retrouve ainsi l’autorité morale, religieuse, le sens de la communauté, le besoin d’appartenance communautaire. Les croyances ou les visions de cet idéal priment et veulent trop souvent s’imposer qu’elles qu’en soient la réalité pratique ou les conséquences. Elles sont avec Saturne imbibées de valeurs et de principes passéistes. Le fanatisme en est une dérive.
De l’autre côté, Uranus en Taureau met son esprit d’invention au sens très pratique du Taureau. On est tourné vers l’efficacité et l’ingéniosité est à l’œuvre. C’est un duo qui peut démontrer beaucoup d’entêtement, et aussi de cynisme. L’organisation bien rodée s’impose. On peut comprendre entre autres que le développement de l’intelligence artificielle est encouragé sous cette influence. La présence d’Uranus dans ce signe remet en question bien des façons de faire. L’esprit libertaire surtout pour ce qui permet d’améliorer les possessions est ici favorisé. Le (ou les) système économique et les banques sont aussi touchés avec ce duo. Là aussi, il y a beaucoup de renouveau et celui-ci bouleverse non seulement les habitudes mais aussi les gouvernements qui doivent également s’adapter.
Deux énergies très fermes dans leur façon d’être installent facilement un dialogue de sourds. Ils peuvent s’entendre aussi, alliant l’ingéniosité à une vision transcendante. On a des exemples autant dans l’attaque du Hamas en Israël, que la réponse vengeresse de ce pays. De même pour la Russie ayant envahi l’Ukraine, qui malgré le succès rapide attendu du début qui ne s’est pas du tout avéré, s’entête dans son but de recréer la grande Russie. Un écho que l’on retrouve en Israël, où on aspire à retrouver le grand Israël. Des visions basées sur des références au passé mais qui sont tout aussi destructrices et au terrible coût humain dans leurs envies d’en voir la réalisation. On peut y ajouter la Chine avec son désir d’expansion maritime jusqu’aux Philippines, Taïwan, etc. Quant à l’Occident, menacé dans sa suprématie et sa démocratie, il est amené à réagir aussi. La liste est longue, l’Inde, le Venezuela…
Et presque partout, la gouvernance (Saturne), en réaction au changement (Uranus) ou en sentiment de perte de contrôle, tombe soit dans un autoritarisme contrôlant et extrême, soit elle est déstabilisée ou vit une perte de confiance. Toute forme de gouvernance actuellement est remise en question et cherche à se réinventer. Il faut dire qu’il n’est pas facile de naviguer avec l’instabilité constante.
Dans ce temps de conflits terribles que nous vivons, emportés souvent par des visions ou croyances anciennes et rétrogrades, ou encore par le désir de possessions plus grandes, que représente Chiron?
Chiron est en Bélier, difficile d’imaginer que dans ce signe d’action, il soit passif. On l’appelle le guérisseur-blessé. Pour ce qui est de la blessure, il est assez aisé de penser au sage qu’il est, la sagesse semble très peu entendue en ce moment, à mon sens, c’est d’abord elle qui est blessée. Et l’équilibre sous plusieurs plans est cassé. L’ancien (Saturne) est d’autant plus perturbé qu’en cette dernière partie du mois d’avril et en mai, Pluton est en demi-carré à Saturne, alors, pour avoir à lâcher-prise sur quelque chose, là, il y aura obligation. On retrouve ce demi-carré tout l’automne prochain. Et Chiron doit alors travailler plus fort!
On peut facilement imaginer que Chiron en Bélier est en lien avec tout ce qui s’active à trouver des solutions, car c’est une de ses forces comme guérisseur. On peut l’imaginer autant sur le terrain, tous ceux qui soignent, qui cherchent à apporter des vivres à Gaza par exemple, ou qui œuvrent à soulager autour d’eux. Sur un plan plus large, le monde diplomatique est plus que mobilisé et les discussions entre pays sont tous azimuts. Les succès probants sont encore difficiles à voir, ce qui n’en fait pas une énergie inutile, il faut voir avec le temps. Dans ce domaine également, il faut être inventif, trouver de nouvelles voies, les anciens codes ne fonctionnent plus ou sont remis en question. Et on peut s’attendre à qu’il y ait tout de même certaines avancées pour des solutions.
De plus, il est clair qu’un passé s’en va et qu’en ce sens, il faut en prendre note, en faire le deuil et s’adapter. Le temps paisible dans lequel on vivait est pour le moins perturbé, la continuité est rompue, ce qui donne l’espace cependant pour créer du nouveau (Uranus-Prométhée).
Chiron nous indique particulièrement en ce moment, avec cette position mitoyenne, qu’on ne peut nier se retrouver entre l’ancien et le nouveau. Sur tellement de plans, comme on a vu plus haut, les paradigmes ont changé. On entre de plus en plus rapidement dans un monde nouveau. Saturne va le rejoindre en 2028 en Taureau, puis Saturne se rapprochera d’Uranus pour le rejoindre en 2032. Quant à Chiron et Uranus c’est en 2042-43 qu’ils se rencontrent. Pas obligé d’être en guerre tout ce temps! Ces étapes sont une indication d’un lent processus pour cette réalité nouvelle, chargée encore d’inconnu, qui s’installe.
Pour cette année et début 2025, la position actuelle de Chiron laisse entendre qu’on vit particulièrement l’ambivalence entre l’ancien et le nouveau, on est écartelé entre ces deux pôles, entre la résistance et l’entêtement, et l’ouverture et le lâcher-prise. Il faudra aussi résister à ne pas se laisser paralyser par un sentiment de sans issue. Cela s’avérera sûrement important concernant les tensions à saveur guerrière et pour les changements climatiques.
Chiron, en ce temps qui bouge tellement, est en train de passer le flambeau à Prométhée, et ça demande de savoir s’ouvrir, d’être prêt à comprendre et à intégrer plus large, à laisser tomber des frontières intérieures et surtout à croire au potentiel humain, à sa capacité de se réinventer et d’aller plus loin.
Renée Lebeuf
Référence de lecture: Chiron, la blessure qui éveille. Renée Lebeuf. Ed : Christian Feuillette